Noël, fête d’origine païenne ? Une alternative aux célébrations païennes ? S’agit-il d’une légende ?
Certains affirment que des divinités païennes antérieures à Jésus-Christ sont nées le 25 décembre. Dans les films populaires, les vidéos sur Internet et d’autres médias, on trouve de longues listes de dieux qui seraient nés le même jour ! Ainsi, Noël serait une fête d’origine païenne (soit-dit en passant, on dit la même chose d’Halloween). Cette idée n’est pas limitée aux non-croyants. De nombreux chrétiens affirment que la date de Noël était destinée à offrir une alternative aux célébrations païennes. D’une certaine manière, c’est devenu une légende pieuse. D’autre part, certains fondamentalistes refusent de célébrer Noël pour cette raison… De toutes les divinités dont les gens se réclament, seules trois s’en rapprochent : Saturne, Sol Invictus (Soleil invaincu) et Mithra.
La fête de Saturnalia, ou des Saturnales
Les Saturnales étaient les fêtes dédiées au dieu romain Saturne. Créée vers 220 avant J.-C., cette fête était initialement célébrée le 17 décembre. Par la suite, la fête a été étendue à une semaine entière, se terminant le 23 décembre. Le lien supposé avec Noël est basé sur la proximité des deux fêtes l’une par rapport à l’autre. On peut trouver cette affirmation sur Internet. Dans son article Saturnales, les raisons pour lesquelles nous fêtons Noël en décembre, le chroniqueur Mark Whittington explique :
« Les chrétiens du IVe siècle ont attribué le 25 décembre à l’anniversaire du Christ (et donc à Noël) parce que les païens observaient déjà ce jour comme un jour férié. De cette façon, le problème de l’élimination d’un jour férié déjà populaire serait contourné, ce qui faciliterait la christianisation de la population. »
Si cette affirmation était correcte, on s’attendrait à trouver au moins une référence des premiers chrétiens pour la soutenir. Mais, au lieu de cela, nous trouvons des dizaines de citations des Pères de l’Église souhaitant se distancer des religions païennes !
La fête de Sol Invictus
La fête de Sol Invictus est la tentative de l’empereur romain Aurélien de réformer le culte de Sol, le dieu romain du soleil, et de le réintroduire auprès de son peuple, en inaugurant le temple de Sol et en organisant des jeux pour la première fois, en 274. Non seulement cette fête n’était pas annuelle, mais elle ne peut être historiquement documentée comme ayant été établie le 25 décembre par Aurélien (1).
La fête de Mithra
D’après des inscriptions sur des votives de bougies et d’autres œuvres d’art antiques, il existe un lien entre Mithra et Sol Invictus. Dans certains cas, il semble que les mithraïstes croyaient que Mithra et Sol étaient deux manifestations différentes du même dieu. Dans d’autres, ils semblent être deux dieux unis en un seul. Ces liens sont difficiles à comprendre étant donné notre connaissance limitée du système de croyance mithraïque, mais ils sont importants car ils permettent d’expliquer pourquoi les sceptiques affirment que l’anniversaire de Mithra était célébré le 25 décembre.
Un manuscrit connu sous le nom de Chronographie de 354 montre la naissance de Sol Invictus célébrée le 25 décembre. Étant donné que les mithraïstes assimilaient leur dieu à Sol d’une manière ou d’une autre, il est compréhensible qu’ils aient pu s’approprier cette date. Le problème, pour le sceptique, est qu’aucune preuve n’existe pour suggérer qu’Aurélien était un mithraïste, ou qu’il avait même le mithraïsme à l’esprit lorsqu’il a institué la fête de Sol Invictus. Le lien entre Mithra et le 25 décembre n’est qu’une coïncidence !
Le coup fatal porté au parallèle entre Mithra et Sol Invictus est que la Chronographie de 354 voit la première mention d’un dieu païen célébré le 25 décembre. La célébration de la naissance du Christ par les chrétiens est également mentionnée dans le calendrier comme ayant été célébrée ce jour-là, ce qui diminue la probabilité que la fête païenne soit venue en premier. À tout le moins, cela réfute l’affirmation selon laquelle il est possible de prouver, à partir des archives historiques, qu’une fête païenne du 25 décembre a précédé la tradition chrétienne.
La raison du choix du 25 décembre
Bien que la date de la naissance du Christ ne nous soit pas donnée dans l’Écriture, il existe des preuves documentées que le 25 décembre revêtait déjà une certaine importance pour les chrétiens avant l’an 354. On en trouve un exemple dans les écrits d’Hyppolyte de Rome, qui explique dans son Commentaire sur le livre de Daniel (vers 204) que la naissance du Seigneur était censée avoir eu lieu ce jour-là :
Car le premier avènement de notre Seigneur dans la chair, lorsqu’il naquit à Bethléem, fut le 25 décembre, mercredi, alors qu’Auguste était dans sa quarante-deuxième année, mais depuis Adam, cinq mille cinq cents ans. Il a souffert la trente-troisième année, le 25 mars, vendredi, la dix-huitième année de Tibère César, alors que Rufus et Roubellion étaient Consuls.
La référence à Adam peut être comprise à la lumière d’un autre écrit d’Hyppolytus, le Chronicon, où il explique que Jésus est né neuf mois après l’anniversaire de la Création. Selon ses calculs, le monde a été créé à l’équinoxe de printemps, le 25 mars, ce qui signifie que Jésus est né neuf mois plus tard, le 25 décembre.
- Lire aussi : Pourquoi Noël est fêté le 25 décembre ?
Quand Noël n’était pas toujours le même jour…
Louis Duchesne, liturgiste du XIXe siècle, explique que « vers la fin du IIIe siècle, l’usage de célébrer l’anniversaire du Christ s’était répandu dans toute l’Église, mais qu’il n’était pas observé partout le même jour » (1). En Occident, la naissance du Christ était célébrée le 25 décembre, et en Orient le 6 janvier.
Louis Duchesne écrit aussi :
« On est porté à croire que l’Église romaine a fait choix du 25 décembre pour entrer en rivalité avec le mithraïsme. Cette raison, cependant, laisse inexpliqué le choix du 6 janvier ».
Sa réponse est donc que la date de la naissance du Christ a été décidée en prenant comme point de départ le jour même où l’on croyait qu’il était mort. Cela expliquerait les divergences entre les célébrations en Orient et en Occident.
Étant donné la grande aversion de certains chrétiens pour tout ce qui est païen, la conclusion logique est qu’une fête n’a rien à voir avec l’autre. Dans son livre L’esprit de la liturgie, le pape Benoît XVI explique :
On prétendait autrefois que le 25 décembre s’était développé en opposition au mythe de Mithra, ou comme une réponse chrétienne au culte du soleil invaincu promu par les empereurs romains au troisième siècle dans leurs efforts pour établir une nouvelle religion impériale. Cependant, ces anciennes théories ne peuvent plus être soutenues. Le facteur décisif a été le lien entre la création et la Croix, entre la création et la conception du Christ.
Si ces explications sur la façon dont le 25 décembre est devenu la date de Noël sont toutes plausibles, une chose est sûre : les preuves que ce jour avait une signification particulière pour les chrétiens sont antérieures à celles d’une prétendue célébration de Sol Invictus ou d’autres divinités païennes ce jour-là.
Le fait que les chrétiens aient choisi une date si proche du solstice d’hiver ne prouve pas non plus qu’il s’agissait d’imiter les fêtes païennes. Les diverses religions païennes avaient toutes des fêtes qui s’étalaient sur tout le calendrier. Quel que soit le mois que les premiers chrétiens auraient pu choisir, la date de Noël serait toujours proche d’une fête païenne, et les théoriciens de l’opposition feraient toujours les mêmes affirmations.
Le solstice était important pour tout le monde pour des raisons agricoles, de la même manière que l’eau est importante pour la survie des êtres humains, et nous voyons donc des rituels impliquant l’eau apparaître dans diverses religions. Cela ne prouve pas que l’une a emprunté l’idée ou le thème à une autre.
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Notes
(1) cf. Steven HijMans, Sol Invictus, The Winter Solstice, and the Origins of Christmas, Mouseion, Series III, vol. 3, pp. 377-398)
(2) Christian Worship, Its Origin and Evolution : a study of the Latin liturgy up to the time of Charlemagne, p. 260.
(3) ibid., p. 261.
(4) p. 105-107.
Traduit de l’anglais par Lalumieredenoel.com depuis Catholic.com.
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